Dans le cadre du projet de loi de finances actuellement débattu au Parlement, le Gouvernement propose un plan d’austérité de 60 milliards d’euros. Bien que 20 milliards d’euros de recettes fiscales supplémentaires soient prévus, une coupe massive de 40 milliards d’euros dans les dépenses publiques de l’État, des collectivités territoriales et de la Sécurité sociale est annoncée.
Depuis 2017, les choix budgétaires successifs en faveur des plus aisés et des grandes entreprises cotées au CAC 40 ont entraîné une baisse massive des recettes publiques, estimée à 62 milliards d’euros en 2023, soit près d’un tiers du déficit prévisionnel pour 2024. La Cour des comptes alerte régulièrement sur l’érosion des recettes fiscales, appelle à réexaminer les niches fiscales inutiles estimées à 45 milliards d’euros, et à lutter contre la fraude fiscale évaluée entre 30 et 100 milliards d’euros par an.
Les collectivités territoriales disposent de finances saines, avec des budgets équilibrés et une dette stable. Les communes en particulier réalisent, à elles seules, près de 70 % de l’investissement public en France. La dette des collectivités, qui représente seulement 9 % de la dette nationale, est mobilisée pour répondre aux besoins sociaux, écologiques et citoyens. En rénovant ou en construisant des équipements scolaires, culturels, sportifs, pour la petite enfance, pour faire face à la grande précarité et à l’augmentation de la pauvreté, pour mener des politiques de prévention de tranquillité et garantir la sécurité de nos habitants, en agissant pour l’amélioration du cadre de vie… Ces investissements contribuent aux services publics et à l’attractivité de nos territoires et génèrent par ailleurs des emplois locaux pour les entreprises du territoire.
La Cour des comptes alerte également sur le besoin d’investissements pour l’adaptation climatique. Les collectivités doivent conserver les moyens d’investir pour protéger leurs territoires et leurs populations. Agir pour adapter nos villes au dérèglement climatique et ses conséquences qui peuvent être parfois dramatiques, comme nous l’avons vu dernièrement à Valence en Espagne, c’est notre responsabilité en tant qu’élus locaux.
À Annecy, si le gouvernement maintient ses coupes budgétaires prévues dans le projet de loi de finances, cela signifierait une réduction de plus de 7,5 millions d’euros, un montant significatif comparé aux budgets de nos différents services publics. Pour exemple, la Ville d’Annecy verse 14 millions d’euros de subventions aux différentes associations du territoire. Chaque année, notre collectivité a besoin d’un peu plus de 13 millions d’euros pour faire fonctionner sa restauration municipale et apporter une alimentation de qualité à nos petits et à nos ainés. Amputer notre de ville de plus de 7 millions d’euros cela reviendrait également à réduire d’un tiers le budget du Centre Communal d’Action Sociale, dont les agents apportent quotidiennement une aide aux plus démunis d’entre nous. Ces mesures amèneraient une précarisation accrue des agents publics et donc accélèreraient la crise des vocations qui sévit dans plusieurs secteurs du service public. Par exemple, 7 millions d’euros représente le budget annuel pour gérer les 21 crèches publiques de notre ville. Un secteur de la petite enfance en souffrance, particulièrement à Annecy, dont le personnel aurait besoin de revalorisation et de reconnaissance. En tant qu’employeur, la Ville d’Annecy serait donc contrainte dans sa politique de revalorisation des agents publiques.
Ces politiques et services publics de proximité sont essentiels à la cohésion sociale et au bien-être des habitants. Nous refusons de les dégrader.
Ces coupes s’ajoutent à une baisse continue des dotations depuis 2010 et à la suppression progressive des impôts locaux, limitant les marges de manœuvre des collectivités tout en les contraignant à financer de nouvelles charges sans compensations. En imposant injustement jusqu’à 10 milliards d’euros de coupes, le Gouvernement impose des efforts supérieurs aux baisses de dotations passées, avec des effets dévastateurs pour les services publics locaux.
Depuis 2010, les collectivités locales ont pourtant vu leurs marges de manœuvre budgétaires se réduire drastiquement en raison de la baisse continue des dotations de l’État (DGF) – 71 milliards d’euros – de la suppression progressive des leviers fiscaux dont elles disposaient, comme la taxe d’habitation, et de nouvelles charges imposées sans compensations financières adéquates. Ces pertes de ressources propres constituent une nouvelle étape de recentralisation des finances publiques.
Les collectivités font face à une multiplication de crises répétées qui ne feront que s’amplifier : réchauffement climatique, épuisement des ressources, coût de l’énergie élevé, émergence de risques géopolitiques, explosion des besoins sociaux : pauvreté grandissante, crise du logement… Pour relever ces défis, l’échelle des collectivités est la plus adaptée pour agir et proposer des solutions. Leurs budgets et leur pouvoir d’agir doivent être préservés et renforcés.
Confirmer ces mesures d’austérité provoquerait un effondrement progressif et certain de nos services publics de proximité, pouvant aller jusqu’à leur disparition, renforçant encore plus les inégalités sociales et donc le ressentiment et la défiance des classes populaires vis-à-vis des responsables politiques. Alimentant ainsi davantage le terreau populiste de l’extrême droite.
Les collectivités locales ne sont en rien responsables de la situation budgétaire nationale. Non seulement l’État leur fait supporter le poids du déficit, mais il les asphyxie profondément et délibérément.
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